Avez-vous remarqué que c’est dans nos paradoxes que nous apercevons ce qui est juste pour nous ? Les paradoxes nous permettent de sortir de l’illusion de nos interprétations et croyances pour accéder à une connaissance aiguisée de nous-même et à une compréhension du monde tel qu’il est réellement, pas forcément accessible à notre mental. Le paradoxe est une manière de percevoir la réalité et d’accéder au discernement.
« Le paradoxe, ou la clé, ou l’attrape-nigaud, c’est que l’affirmation de notre volonté est le fondement de notre esclavage, tandis que notre soumission est la condition de notre liberté. » Arnaud Desjardins
Le paradoxe
Le sens du paradoxe
Le terme paradoxe est issu du grec paradoxos (para : contre et doxa : opinion) et exprime une idée invraisemblable ou la réunion de deux idées opposées. Le paradoxe surprend, bouscule notre raison, trouble notre mental et nous donne accès à une autre perception de la réalité. Il va à l’encontre du sens commun, des préjugés, de la logique, de ce que l’on a appris, de ce qui nous semble cohérent. Là où les mots sont trop figés pour exprimer une idée, le paradoxe révèle une cohérence autre, accessible uniquement par l‘intuition.
Par la contradiction qu’il porte en lui, le paradoxe met la lumière sur une réalité irrationnelle ou illogique. S’il est de prime abord une absurdité, cette absurdité nous pousse à la réflexion et nous met face à la simplicité de la réalité que l’on a tendance à complexifier, à rationaliser. Elle réconcilie les contraires, repousse les apparences et révèle une perle de sens !
« Paradoxe ! Quand la vérité sort, c’est le nom qu’elle porte. » Jean Cocteau
Exemples du Tao te king
Le Tao Te King, livre de la voie et de la vertu, est extrêmement riche en paradoxes. Leur utilisation par Lao Tseu permet de tenter une définition du Tao, source de toute chose, par nature indéfinissable, afin de nous libérer de nos illusions.
« Le Tao ne prend pas parti ; il donne naissance au mal comme au bien. (…)
Le Tao est comme un soufflet : il est vide mais infiniment capable.
Plus tu l’utilises, plus il est fécond ; plus tu en parles, moins tu le comprends. »
« Le succès est aussi dangereux que l’échec. L’espoir est aussi vain que la peur. »
« Si tu veux être entier, laisse-toi être partiel.
Si tu veux être droit, laisse-toi être tordu.
Si tu veux être plein, laisse-toi être vide.
Si tu veux renaître, laisse-toi mourir.
Si tu veux que tout te soit offert, renonce à tout ce que tu as. »
Exemples du boudhisme zen
Dans le bouddhisme zen, les enseignements sont fait de paradoxes, sous forme de Koans. Le méditant est invité, par ces courts textes inaccessibles au mental, à mettre de côté sa vision habituelle des choses pour laisser le souffle de l’intuition le traverser et ainsi accéder à une forme de discernement, de compréhension, à l’éclosion spontanée d’une fleur inconnue : l’éveil. Un seul Koan peut être médité pendant plusieurs années… jusqu’à l’apparition de l’évidence (ou pas) !
« Joshu demanda à Nansen : Qu’est-ce que la voie ?
La vie quotidienne est la voie ! répondit Nansen.
Peut-on l’étudier ?
Plus tu essaies de l’étudier plus tu t’en éloignes !
Mais si je ne l’étudie pas, comment saurais-je ce qu’est la voie ?
La voie n’appartient pas au monde de la perception ni au monde de la non-perception. La connaissance est illusion, et la non-connaissance est pure folie. Si tu veux suivre le chemin qui mène au-delà du doute, tu dois être aussi libre que le ciel ! Le ciel, tu ne dis pas qu’il est bon et tu ne dis pas qu’il est mauvais ! »
Les paradoxes de la bioanalogie
L’action du paradoxe
Le mental fonctionne dans la dualité et a tendance à séparer, à cloisonner, à analyser et à juger de façon nette et bien tranchée. Nous pensons avoir une vision cohérente du monde, une représentation logique de la réalité et voici qu’un paradoxe vient tout bousculer et sortir notre mode de penser de ses rails. Le paradoxe vient heurter les limites de notre logique et nous invite à une expérimentation directe et intuitive de la réalité, une réalité où tout est relié.
Tout comme ceux de la physique quantique, les propos de la bioanalogie sont emplis de paradoxes et court-circuitent notre mental, nous dénudant devant l’évidence. Ils nous mettent face à nos illusions, à notre fonctionnement de survie entretenu par notre ego et notre mental. Alors, face à notre nature paradoxale où nous voyons que nous sommes tout et rien à la fois, le silence est d’or.
« Le chemin du paradoxe est le chemin du vrai. Pour éprouver la Réalité, il faut la voir sur la corde raide. On ne juge bien des Vérités que lorsqu’elles se font acrobates. » Oscar Wilde
Petits Koans bioanalogiques
Je vous propose d’explorer quelques notions de bioanalogie à travers des Koans zen traditionnels, des phrases de Jean-Philippe Brébion ou autres citations, sans explication autre que l’illusion à laquelle ils font référence selon moi. Restons intègre avec la puissance du paradoxe !
L’illusion de la dualité
« Quel est le bruit d’une seule main qui applaudit ? » Koan zen
« Le bambou existe au-dessus et en dessous de son nœud. » Koan zen
« Il n’est qu’un univers, nous-même. » JP Brébion
L’illusion de la solitude
« Passons du seul à l’unique. » JP Brébion
« Mille choses sont à la fin une. » Koan zen
« Quand la neige fond où va le blanc ? » Koan zen
L’illusion du chemin à suivre
« La voie est sous vos pieds. » Koan zen
« Le chemin se dessine à chaque pas. » JP Brébion
« Lorsque tu es en montagne, prends soin d’effacer les traces que tu laisses derrière toi de façon à ce que personne ne marche dans tes pas. » René Daumal
« Il n’y a plus de chemin, chaque instant est un sommet. » Dialogues avec l’ange
L’illusion d’une place ou d’une « mission de vie » à trouver
« Comme dans un miroir, vous êtes le reflet, mais le reflet n’est pas vous ! » Koan zen
« Quel était votre visage avant la naissance de vos parents ? » Koan zen
« Ma place n’est ni un lieu, ni un rôle, ni une fonction. » JP Brébion
« Écoute le silence. » Koan zen
L’illusion d’une vérité unique et absolue
« Je suis le chemin, la vérité et la vie » Jésus Christ
« La réalité est l’idéal. » JP Brébion
« Il n’est qu’une vérité : nous-même. Il y a autant de vérités que d’êtres humains. » JP Brébion
L’illusion d’un résultat à obtenir
« Recherchez la liberté et vous deviendrez esclave de vos désirs. Recherchez la discipline et vous trouverez la liberté. » Koan zen
« Pour savoir si l’eau d’un bol est chaude ou froide, il faut y mettre le doigt… Il ne sert à rien de discuter. » Koan zen
« À esprit libre, univers libre. » Koan zen
« Je suis vivant dans mes limites. » JP Brébion
« La vie n’est pas un but à atteindre mais une expérimentation. » JP Brébion
L’illusion que l’amour se donne ou se reçoit
« Il existe un curieux paradoxe : quand je m’accepte tel que je suis, alors je peux changer. » Sénèque
« L’amour est un constat. » JP Brébion
« Dire oui à soi c’est parfois dire non à l’autre. » JP Brébion
L’illusion d’un sens ou d’une direction à donner
« Tout ce qui me touche n’est que moi-même » JP Brébion
« Une journée, une vie. » Koan zen
« Il n’y a aucun sens à donner, le sens se révèle à travers moi. » JP Brébion
« L’homme regarde la fleur, la fleur sourit. » Koan zen
« Le corps est l’arbre de l’éveil, l’esprit, un pur miroir sur sa monture. Je m’efforce de le nettoyer afin qu’aucune poussière ne s’y dépose. » Koan zen
L’illusion d’un but à atteindre
« Le soleil de midi ne fait pas d’ombre. » Koan zen
« La présence est action. » JP Brébion
L’illusion d’un accomplissement à venir, l’illusion du manque ou de l’urgence
« Le Maître ne recherche pas l’accomplissement. Ne cherchant rien, n’attendant rien, il est présent et peut accueillir toutes choses. » Tao Te King
« Deviens ce que tu es. » Koan zen
« Ce qui te manque, cherche-le dans ce que tu as. » Koan zen
« Exister, être présent, c’est manquer. » JP Brébion
« Tout est là. » JP Brébion
« Lorsqu’il n’y a plus rien à faire, que faites-vous ? » Koan zen
« Le courant rapide n’a pas emporté la lune. » Koan zen
« La vie est un papillon éphémère arborant les ailes du paradoxe. » Benoît Gagnon
...
Observez-vous vos paradoxes intérieurs, sources de conscience ? Sentez-vous la puissance du paradoxe ? N’hésitez pas à témoigner, partager, commenter dans l’espace de commentaire ci-dessous. Merci !
コメント